Prévention des risques de l’ablation

Franck Rogé Picard, Infirmier, CHU Rouen, Février 2022

 

La rythmologie interventionnelle, comme toutes les pratiques médicales invasives, présente de nombreux risques. Quels sont-ils ? Comment peut-on les prévenir ?

 

Formation, Expérience

 

La rythmologie demande de nombreuses connaissances et compétences: lecture des ECG de surface, compréhension des tracés endocavitaires, connaissance de l’anatomie cardiaque et des structures environnantes, maitrise du matériel utilisé pour les procédures et en cas d’urgence.  

Notre spécialité se développe rapidement avec de nombreuses et fréquentes nouveautés. (systèmes de cartographie 3D, cathéters haute définition, énergies…)

Pour assurer la sécurité du patient en collaboration avec les rythmologues, il est indispensable d’avoir des paramédicaux formés à toutes ces techniques, connaissant les risques associés à chaque procédure et capables d’agir rapidement et de façon appropriée en cas de complication. Tous les moyens de formations existants doivent être utilisés (congrès, journées organisées par les partenaires, DU, …). Notre métier est nouveau. Il parait nécessaire de créer de nouvelles formations qualifiantes.

Dans chaque équipe doivent se dégager des experts aptes à former les nouveaux collègues et à assurer une continuité des soins.

 

Ouverture de salle, dossier patient

En cas de complication, tout le matériel nécessaire est-il présent et fonctionnel dans le bloc ? Stimulateur, défibrillateur, aspiration, chariot d’urgence, kit de drainage péricardique… doivent être vérifiés quotidiennement. Avons-nous le numéro des anesthésistes, chirurgiens vasculaires ou cardiaques dans notre bloc ?

Nous sommes les derniers en collaboration avec les rythmologues à vérifier que le patient n’a pas de contre-indications à la réalisation de la procédure. Biologie, bonne observance des traitements, allergies, grossesse, examens préalables (ETO, TDM…) doivent êtres vérifiés et notés sur la checklist patient. Le patient est-il dans un rythme cardiaque thrombogène alors que cela était inconnu ?  

 

Risques communs

Le premier risque commun à toutes les procédures est le risque vasculaire. Les ponctions veineuses ou artérielles peuvent se compliquer. Cela peut aller de la simple ecchymose jusqu’à la thrombose aigüe d’un membre inférieur. Hémorragie, hématome, fistules artério-veineuses voire anévrismes sont possibles. La ponction écho guidée est fréquemment utilisée pour éviter ces risques. Une compression, un pansement adapté ou un système de fermeture vasculaire peuvent être utilisés. En cas de surveillance accrue nécessaire, il est important de transmettre les éventuelles complications aux collègues qui vont poursuivre la surveillance post opératoire du patient.

La manipulation des cathéters dans les cavités cardiaques peut être source de traumatismes. Cela peut entrainer un épanchement péricardique pouvant aller jusqu’à la tamponnade. Il est important de pouvoir faire un contrôle échographique rapidement à un patient en cas de douleurs thoraciques suspecte et/ou d’hémodynamique instable . Un échographe doit donc être présent dans le bloc ou à proximité immédiate. Le matériel complet de drainage doit également être disponible (voire drainage péricardique).

Même si les procédures longues et complexes sont effectuées à l’aide de systèmes de cartographie, une partie importante de nos procédures est réalisée à l’aide de rayons X. Toutes les personnes doivent désormais êtres formées à la radioprotection du personnel et du patient. Les appareils radiologiques doivent êtres utilisés correctement, poids et taille du patient renseignés, collimation, hauteur du capteur et utilisation modérée de la graphie sont indispensables pour éviter les risques d’exposition à ces rayons.

Une procédure invasive peut entrainer un risque septique. Celui-ci peut être majoré chez nos patients porteurs de prothèses (prothèses rythmiques, valves). En plus des règles d’hygiène inhérentes au travail en bloc, ils peuvent nécessiter une antibiothérapie prophylactique.

Certains actes, réalisables sous anesthésie locale, peuvent se révéler douloureux. Traitements antalgiques préventifs, hypnose, masque de réalité virtuelle, peuvent au cas par cas être utilisés sur ces procédures (ablation flutter commun, cryoballon …). Une symptomatologie douloureuse inhabituelle doit également faire rechercher une éventuelle complication mécanique.

 

Cavités droites ou gauches ?

Les principales voies de conductions cardiaques sont situées dans les cavités cardiaques droites. Certaines ablations sont réalisées à proximités des voies de conduction (tachycardie jonctionnelles sur RIN ou voies accessoires para hissiennes) et nécessitent une attention particulière pour surveiller la conduction et si besoin arrêter l’ablation si un trouble conductif est observé.

 

Prevention des risques abla 1 doc

Allongement de l’espace AH pendant un traitement par cryothérapie, le tir va être immédiatement arrêté

 

Lors de l’isolation de la veine cave supérieure, un repérage du nerf phrénique doit être réalisé pour éviter une paralysie diaphragmatique.

 

Prevention des risques 2

Isolation de veine cave supérieure après repérage du nerf phrénique par stimulation

 

Une ablation dans les cavités gauches peut entrainer des risques thrombo emboliques. Il faudra veiller à ce que le patient soit correctement anticoagulé et être rigoureux sur l’irrigations des gaines et des cathéters pour qu’il n’y ait aucune bulle.

L’accès à l’oreillette gauche est réalisée par voie transseptale. Pour éviter la perforation de l’aorte cette ponction est faite dans notre centre sous contrôle ETO.

La complication le plus grave de l’ablation de la fibrillation atriale est la fistule atrio œsophagienne. Pour l’éviter il est possible si l’examen est réalisé sous AG, de surveiller avec une sonde thermique la température dans l’œsophage. La puissance des tirs de RF doit être adaptée si la température monte ou si le patient conscient se plaint de douleurs.

 

Différentes énergies

Certaines complications peuvent être inhérentes à l’énergie utilisée. En RF si vous entendez un bruit de POP arrêtez immédiatement le tir. Le sang a été porté à ébullition, cela peut entrainer un épanchement péricardique ou un trouble de conduction.

Dans le cadre de l’ablation de fibrillation atriale par cryothérapie, une surveillance de la capture phrénique est réalisée lors de l’ablation au niveau des veines droites pour éviter une paralysie diaphragmatique.

Pour conclure, les technologies évoluent, nous avons de nouvelles énergies. Celles-ci peuvent engendrer de nouvelles complications. L’électroporation peut entrainer un à-coup vagal entrainant une bradycardie importante voire une asystolie, soyez prêt à stimuler le patient ou à lui injecter de l’atropine.        

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